Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


lundi 18 mars 2024

Corps beau

James Hille

 

Un film : Stair case (L'escalier - 1969 - Stanley Donen)



Synopsis :
Harry, homosexuel vieillissant, tient un magasin de coiffure avec son compagnon de longue date, Charlie, un ancien acteur dont le seul titre de gloire est une ridicule publicité télévisée. Trop gros et plutôt laid, Harry cache une alopécie galopante sous de grotesques turbans et s'occupe avec dévotion de sa vieille mère impotente qui, dans sa chambre du premier étage, geint et récrimine toute la journée. Élégant et portant beau malgré ses fausses dents, Charlie exploite de façon éhontée l'amour que lui voue Harry, n'hésitant pas à se moquer cruellement de lui et à le laisser tomber pour aller draguer dans des clubs spécialisés.
Justement, au cours d'une de ces soirées, il a commis l'erreur de se travestir en femme et de faire des avances à un jeune homme qui s'est avéré être de la police. Le jeune homme a porté plainte et depuis, Charlie vit dans la terreur d'être convoqué devant le tribunal...




C'était bien avant  que la "Cage aux folles" de Jean Poiret ne triomphe au Théâtre du Palais Royal, bien avant son adaptation cinématographique, bien avant son exportation à Broadway, bien avant l'actuelle et piteuse reprise qui fait se presser au Théâtre de la Porte Saint Martin un public gavé de promotion télévisuelle.
L'adaptation à l'écran par Stanley Donen ("Singin in the rain", pas moins !) de la pièce de Charles Dyer a un tout autre goût que la comédie où explosait Michel Serrault.
Il y a, certes, des moments que le talent de Burton et de son compère Rex Harrison (déjà partenaires dans "Cléopatre") rend irrésistibles de drôleries.
Mais l'on y aborde des sujets plus graves qui teintent le film, pas l'une des grandes réussites de Donen cependant, d'une vague mélancolie.
Il n'en est reste pas moins que l'entreprise, en 69, était pour le moins courageuse.
Dans la petite histoire de la gayté cinématographique, ce film est trop souvent oublié.



vendredi 15 mars 2024

mardi 12 mars 2024

Marco Bozzato, fouloulissimo !

Marco Bozzato par Giuseppe Morello
Marco par Aleksey Zubarev (2018)

Les damnés ne pleurent pas

Ce film, sorti en juillet 2023, a échappé à ma légendaire sagacité.
On peut le voir en vidéo à la demande (Canal VOD, entre autres).
Je le regarde dès que possible.
Si vous l'avez vu, qu'en pensez-vous ?

Perroquet bavard

 

lundi 11 mars 2024

De tous temps, en tous lieux, lire

 Abel Rassat par Vivienne Mok

 

Mon amant de Saint-Jean | Épisode 85 : Jouer à faire semblant

    Neuf-Brisach, août 1938

    Il y a deux Brisach : le neuf, en France, et le vieux, Breisach am Rhein, de l’autre côté du fleuve. Il faut quelques battements d’ailes à une escadrille d’alouettes pour relier les deux villes. Depuis l’arrivée de Hitler au pouvoir, de l’autre côté, la vieille cité du Bade-Wurtemberg n’est plus du même monde.
    Pour donner quelque crédit à la rumeur d’une idylle pour le moins hypothétique avec Mathilde Meyer. Roland Sieffert vient la chercher au presbytère après le culte du dimanche et l’emmène pour une promenade sur le chemin qui longe le Rhin, où ils peuvent croiser des concitoyens, lesquels, souvent, leur adressent un sourire de connivence. Ils se nichent au creux d’un tapis d’herbes sauvages pour des conversations d’une banalité qui assombrit l’humeur du garçon, éveillent sa nostalgie de la grande ville et de ses cinémas, des tubes de néon qui ensoleillent la vitrine du magasin de Monsieur Kurz, le photographe, devant laquelle, chaque soir, il prend racine pour observer dans ses moindres détails l’objet de sa convoitise, cette caméra Pathé Baby à ressorts avec laquelle il s’imagine, en petit Jean Renoir, filmant les mille scénarios qu’il a échafaudés dans les moments où la solitude lui ouvre les portes du rêve de sa vie.
    Pauvre Mathilde qui croit déceler, en Roland, un émoi qu’elle inspire sûrement, alors que, braquant son regard sur l’autre rive, rien n’échappe au jeune homme des adolescents des Jeunesses Hitlériennes, que tout, par ailleurs, l’incite à détester. Ils s’exercent à la lutte, torses nus, gonflés d’une puissante musculature, bronzés, farouches, déjà prêts aux combats futurs ! Ils ont confectionné une sorte de grande piscine gonflable où ils s’ébattent à présent, débarrassés de tout vêtement. Roland plaque ses deux mains sur les yeux de la gamine : « Ne regarde pas, Mathilde ! », quand lui se repaît, en douce, du spectacle.
    Si ce n’était l’amour de ses parents, sa tendre complicité avec sa sœur, ces vacances dans sa cité natale, lui seraient une épreuve insurmontable. Il s’est décidé à rédiger une longue lettre, cent fois réécrite, à Marcel, le Montpelliérain, qui, à cette heure, doit faire la fête sous le soleil méditerranéen et, sans nul doute, faire l’amour. Roland ne doit les battements de son cœur qu’à la grande illusion qui s’est emparée de lui quand l’équipe du grand cinéaste a pris d’assaut sa terre natale au cours de l’hiver le plus doux de sa jeune vie. Il aura bientôt dix-sept ans. Comment les vivre pleinement, ici ?
  (À suivre)   ©  Louis Arjaillès - Gay Cultes 2024  
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Petit jeu littéraire

L'appartement du prof ?

[Presque effrayé de cette nouvelle puissance qui, pendant six heures, avait fait vibrer tous mes sens, en les stupéfiant, j'éteignis la lumière, mais en moi-même les images continuèrent de briller et de fulgurer ; je pus à peine dormir dans le désir et l'attente du lendemain qui, pensais-je, élargirait cet univers qui s'était découvert à moi d'une manière si enchanteresse, et en ferait entièrement ma propriété.] C'est extrait d'un beau roman écrit, selon moi, par l'un des plus grands auteurs du début du XXᵉ siècle. Un petit indice dans la légende de la photo.